News

Portrait de Paul Esmein (ENSAE 2004)
Pourrais-tu nous parler de tes études, des matières que tu aimais étudier, de ton choix à la sortie de l’ENSAE ?
En classes préparatoires, j’aimais surtout les maths : le choix de l’ENSAE s’est donc imposé assez naturellement ! Cet goût des maths m’a ensuite conduit à suivre la filière finance / actuariat et je pensais initialement m’orienter vers un poste en finance de marché. Les stages que j’ai faits, les professeurs que j’ai eus et les cours que j’ai suivis durant ces trois années d’études m’ont fait changer d’avis et j’ai décidé à la fin de l’ENSAE de passer le concours de l’autorité de contrôle des assurances.
C’est ainsi que j’ai rejoint la fonction publique dans le corps de « commissaire contrôleur des assurances » – qui a depuis été fusionné avec celui des Mines. J’ai passé 3 années passionnantes à l’autorité de contrôle des assurances. J’ai notamment vu ce corps de contrôle se transformer en profondeur pour évoluer vers une structure plus normée avec une importance croissante des institutions européennes. C’est là que j’y ai appris les bases de l’assurance, qui me sont encore utiles aujourd’hui !
J’ai recherché combien de concours de commissaires contrôleurs avaient été organisés. Il semble qu’il y en ait eu seulement deux, en 2003 et 2004. Tes débuts dans l’assurance sont vraiment le fruit du hasard !
Comme pour beaucoup de personnes, le hasard a certainement joué un rôle dans le choix de mon premier poste. Cela dit, il y a beaucoup d’anciens de l’ENSAE dans l’assurance et c’est logique : suivre des cours d’actuariat vous conduit naturellement vers ce secteur. Après mon poste de commissaire contrôleur, j’ai ensuite choisi de rejoindre la direction générale du Trésor où j’ai travaillé avec Guillaume Autier, chef adjoint de la division des marchés financiers. Lorsqu’il est parti en cabinet ministériel, son poste m’a été proposé et je l’ai accepté.
J’ai demandé à Guillaume de se rappeler comment s’était passée cette transition – voici sa réponse.
Paul suivait pour l’ACPR les sujets de titrisation de risque d’assurance sur lesquels je travaillais pour le Trésor. Il m’a tout de suite semblé très précis, très attentif aux enjeux de protection du consommateur et en même temps très au fait des réalités du secteur privé. Nous avons très bien travaillé ensemble sur ce projet de loi. Quand j’ai quitté le Trésor pour rejoindre un cabinet ministériel, j’ai proposé son nom pour me succéder à mon poste. Il y a fait merveille et a été unanimement apprécié.
Plus tard, nous sommes restés en contact et devenus amis. J’aime beaucoup sa vision très philosophe de l’existence, dans laquelle se combinent beaucoup de sérieux professionnel et, dans le même temps, une vraie liberté personnelle.
Ce poste au Trésor : quelle expérience !
J’y suis resté 5 ans : deux ans au sein du bureau des marchés financiers puis trois ans au bureau des entreprises d’assurance. Mes années au Trésor ont été fantastiques et comptent probablement parmi celles qui m’ont le plus marqué. Elles ont été intellectuellement très stimulantes, malgré la charge de travail particulièrement intense, notamment pendant la crise financière de 2008. J’y ai découvert la mécanique européenne, passionnante, et j’ai été confronté à des processus de prise de décision qui peuvent être parfois déconcertants. Tout cela est très formateur !
Après 9 ans dans la fonction publique, tu envisages un passage dans le privé : comment l’as-tu préparé ?
Cela correspondait à un moment de ma vie personnelle où je ressentais un besoin de nouveaux horizons. Nous avons d’abord décidé ma femme et moi de voyager pendant 9 mois, en Asie et en Amérique du Sud, ce qui a été une expérience formidable.
A mon retour, j’ai souhaité découvrir une nouvelle facette du secteur de l’assurance et j’ai rejoint le groupe Covéa. Là encore, le facteur humain a été déterminant : si j’ai choisi Covéa, c’est avant tout à cause de la personnalité de ses dirigeants et en particulier de Thierry Derez, son PDG, et Didier Bazzocchi, son directeur santé. La première mission qui m’a été confiée était captivante : il s’agissait de créer une nouvelle activité de réassurance. Je suis intimement persuadé que cette approche, qui consiste à fonder ses choix professionnels sur des rencontres humaines avant tout, est pertinente.
J’ai passé au total 9 ans dans ce groupe et j’ai eu la chance que ses dirigeants me fassent confiance : ils m’ont confié des responsabilités croissantes jusqu’au poste de directeur général adjoint. J’y ai énormément appris et y ai côtoyé des personnalités variées et attachantes, que j’ai beaucoup de plaisir à revoir.
Quelle place accordes-tu au hasard et à la transmission dans ta vie ?
Au-delà du hasard initial que j’ai évoqué en début d’entretien, cela fait maintenant 20 ans que j’évolue dans le secteur de l’assurance et ça, ce n’est pas un hasard ! Je connais peu de secteurs qui rassemblent des problématiques aussi variées, qu’elles soient économiques, démographiques ou encore sociétales.
Le désir de transmettre est d’une toute autre nature. Je le relie à ma situation familiale : le fait d’avoir des enfants rend assez naturelle l’idée de transmission. Mais cela remonte pour ma part plus loin encore : entre 25 et 35 ans, j’ai donné beaucoup de cours (à Dauphine, à l’ISUP, à l’ENSAE, au CEA) et j’ai une vraie passion pour l’enseignement. Je pense d’ailleurs que j’y reviendrai un jour !
Parlons de ton poste actuel de directeur général de France Assureurs. Tu as pris ton poste en avril 2024, depuis les dossiers délicats ne manquent pas !
Après avoir quitté Covéa, j’ai multiplié les projets : un nouveau voyage avec ma femme et mes deux enfants, mais aussi une formation d’arbitrage. Même si ce n’est pas ma formation initiale, j’ai toujours eu un intérêt pour la matière juridique. Mon intention était d’ailleurs d’essayer de développer une activité dans ce domaine, lorsque Florence Lustman (Présidente de France Assureurs) m’a contacté pour me proposer le poste de directeur général de la Fédération.
Le défi m’a tout de suite tenté. J’étais ravi d’une part de l’opportunité de travailler de nouveau avec Florence, que j’avais connue il y a 20 ans au sein de l’autorité de contrôle des assureurs. D’autre part, le fond des sujets est vraiment passionnant : d’une certaine manière, cette nouvelle aventure professionnelle est la synthèse de mes expériences précédentes, dans le public puis dans le privé. Il est clair que les sujets ne manquent pas, entre, par exemple, la multiplication des catastrophes naturelles, les émeutes en Nouvelle Calédonie ou encore la prise en charge de la dépendance. Mais c’est précisément sur des sujets de ce type, qui ont une dimension structurelle, qu’une réflexion collective est nécessaire et que le rôle de la Fédération prend tout son sens.
En conclusion, quels conseils donnerais-tu aux ENSAE ?
Je souhaite tout d’abord à chacun de profiter pleinement de ces années d’école, qui passent trop vite. La vie est un savant mélange de hasard, de temporalité et de rencontres humaines : je vous souhaite donc de trouver une voie qui vous passionne et qui vous permette de travailler avec des personnes inspirantes.
Propos recueillis par Priscilla Cournède
Aucun commentaire
Vous devez être connecté pour laisser un commentaire. Connectez-vous.