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01 juillet 2009

Encadrés de La vie des Chiffres

Publié par Olivier Lefebvre (1995) | N° 35 - Variances

Encadré 1

L’échantillonnage dans les communes de plus de 10 000 habitants

Pour chaque commune de plus de 10 000 habitants, la liste des logements soumis à une enquête de recensement résulte d’un échantillonnage parmi les immeubles (adresses) d’habitation, selon la stratégie suivante :
 pour éviter des « effets de grappe », on définit des « grandes adresses », qui seront enquêtées exhaustivement sur le cycle quinquennal et sont donc réparties pour ce faire en cinq groupes annuels. Ce sont les immeubles qui comptent le plus de logements dans chaque commune, avec les contraintes suivantes : ces immeubles doivent comprendre au moins 60 logements ; l’ensemble des grandes adresses d’une commune ne doit pas représenter plus de 10 % des logements de la commune) ;
 les adresses neuves sont également recensées exhaustivement, car on ne dispose pas d’informations permettant de les échantillonner ; elles sont également réparties sur cinq groupes ;
 les « autres adresses » sont réparties en cinq groupes équilibrés, comme le sont les groupes de communes de moins de 10 000 habitants, sur des critères démographiques ou relatifs au parc de logement, chacun des groupes étant uniformément réparti sur le territoire de la commune (une rue donnée comprendra ainsi des adresses des différents groupes) ; chaque année, l’échantillon d’adresses à recenser est tiré dans le groupe de rotation de l’année, de façon que le total des adresses à recenser (grandes adresses + adresses neuves + « autres adresses ») représente environ 8 % du total des logements de la commune.

Encadré 2
Un contrôle en continu de la qualité

L’amélioration en continu du dispositif est un des apports fondamentaux de l’annualisation du recensement. Elle est conduite par une démarche d’évaluation systématique de l’ensemble des processus :
- à l’Insee, par des bilans faits auprès de l’ensemble des acteurs, y compris les responsables communaux du recensement. Ces bilans, qualitatifs et quantitatifs, portent sur la pertinence des processus, l’utilisation de telle ou telle fonctionnalité applicative, les organisations mises en place et les charges de travail. Ils sont menés par voie de questionnaires mais sont fréquemment enrichis par des rencontres bilatérales ;
- auprès des sous-traitants chargés de la saisie, qui établissent en fin de campagne un bilan complet des opérations ;
- via la Commission nationale d’évaluation du recensement créée au sein du Conseil national de l’information statistique (Cnis) et qui se réunit deux à trois fois par an. Présidée par un sénateur, elle associe l’Insee, les communes, des utilisateurs du recensement (administrations, associations d’élus, chercheurs, etc.). Elle évalue les processus de collecte et de contrôle, propose des adaptations des différents protocoles et devra se prononcer sur les changements souhaitables des textes qui régissent l’organisation des opérations de recensement ;
- enfin, des mesures et des contrôles de qualité sont pratiqués à toutes les phases du dispositif (couverture de la base de sondage, collecte, saisie et traitements statistiques, diffusion). Pour cela, l’Insee contrôle son répertoire d’immeubles par des enquêtes de terrain, et la collecte sur le terrain par la confrontation avec des sources administratives, éventuellement arbitrée par une enquête de terrain. Quant aux opérations de saisie et de codification, elles font l’objet d’une double saisie et d’une double codification sur un échantillon des bulletins, suivies dans les deux cas d’une analyse des divergences.

Encadré 3
Le cycle de recensements de 2010 dans le monde

Jean-Michel Durr, Chef de la section des statistiques démographiques, Division de Statistique de l’ONU.

Pendant plus de six décennies, la Commission de statistique de l’ONU et les comités statistiques régionaux ont joué un rôle primordial en soutenant la tenue de recensements dans les états membres. Chaque décennie a fait l’objet d’un « cycle » (round) de recensement, au cours duquel il était recommandé aux pays d’effectuer au moins un recensement. On parle ainsi du « round de 2000 ».

Lors de sa trente-sixième session en mars 2005, la Commission de statistique a approuvé le lancement du programme mondial 2010 de recensement de la population et de l’habitat couvrant la période 2005-2014. Les trois buts essentiels du programme sont de convenir d’un ensemble de principes et de recommandations internationaux régissant la conduite d'un recensement, d’aider les pays à mettre en œuvre au moins un recensement au cours de la période 2005-2014 et enfin de soutenir les pays dans leurs efforts pour diffuser au plus tôt les résultats de leur recensement.

Le cycle de recensement de 2000 s’est caractérisé par un certain nombre de défaillances dans la mise en œuvre des recensements. En effet, 27 pays ou territoires n’ont pas réalisé de recensement au cours de la période 1995-2004, principalement en Afrique où près de la moitié de la population n’a pas été recensée. Les raisons principales tiennent à la situation politique (instabilité, conflits), mais aussi à des questions de financement, le recensement représentant une lourde charge pour un pays, ajouté à un certain désengagement des bailleurs de fonds internationaux. De plus, la qualité de certains des recensements effectués lors de ce cycle est mise en question, que ce soit en raison de problème liés à la couverture cartographique, à la couverture de collecte, à la saisie ou l’exploitation.

La situation semble meilleure pour l’actuel round de 2010. À la fin de 2008, 61 pays ou territoires avaient déjà réalisé un recensement. Ils ne représentent cependant que 18 % de la population mondiale. En 2009, 22 recensements sont planifiés, mais le pic interviendra en 2010, avec 58 pays et 2011 avec 49 pays, dont les pays européens en vertu du règlement communautaire. À cette date, 94 % de la population auront été recensés. Toutefois, 13 pays ou territoires n’ont pas encore planifié de recensement, et un certain nombre de recensements, notamment en Afrique, ont d’ores-et-déjà été reportés d’un an ou deux.

Face aux défis que représente la tenue des recensements, les pays s’emploient à innover pour réduire la charge, améliorer la qualité et accélérer la diffusion des résultats.

La première forme d’innovation concerne l’utilisation des nouvelles technologies à différentes étapes du processus de recensement. À titre d’exemple, la cartographie censitaire bénéficie des avancées dans le domaine des systèmes d’information géographiques (SIG) et de l’utilisation des images satellitales associées ou non au relevé de coordonnées par l’utilisation du système GPS. La cartographie est en effet une des activités les plus critiques d'un recensement. L'exactitude de la délimitation des secteurs d'énumération et la qualité de leur représentation sur une carte ont un impact crucial sur la qualité des données collectées. Certains pays, comme l’Afrique du Sud, délimitent les zones d’agent recenseurs directement sur des images satellitales ou des orthophotos aériennes et envoient ensuite du personnel sur le terrain pour affiner la délimitation et relever les coordonnées GPS de certains équipements (écoles, hôpitaux…) et de toutes les habitations, afin de réaliser ainsi un répertoire des habitations. La réduction du travail terrain permet d’économiser des ressources et de gagner du temps. L'analyse et la diffusion des données de recensement bénéficient également des fonctionnalités des systèmes d'information géographique, par la mise en relation des données de recensement avec des données géographiques ou provenant d’autres sources.

La collecte et la saisie des données font également l’objet de nombreuses avancées technologiques. Certains pays, comme la Colombie, le Brésil, le Mexique ou Oman, ont décidé d’investir massivement sur la saisie portable, à l’aide d’assistants numériques personnels (ANP). Le Brésil a par exemple réalisé en 2007 un comptage de population au moyen de plus de 80 000 ANP disposant dune fonction de récepteur GPS. L’intérêt de tels dispositifs réside dans la possibilité d’intégrer des contrôles de validité et de cohérence au moment de l’entrée des données durant l’interview du ménage, de transmettre les données instantanément de supprimer la saisie ultérieure, ainsi que de faciliter le contrôle du travail de l’agent recenseur, par exemple en vérifiant que les coordonnées GPS recueillies correspondent bien à la zone de recensement qui lui a été attribuée. Le coût des appareils est encore élevé, mais est cependant à mettre en relation avec les coûts d’impression, de transport et de saisie des questionnaires papier. Dans les pays développés, où les questionnaires sont remplis par la population elle-même, la collecte par internet se développe rapidement : introduite sous forme encore expérimentale lors des recensements de la période 2000, elle fait partie désormais des medias incontournables dans les pays développés. L’Australie et le Canada ont obtenu des taux de collecte par internet de l’ordre de 10 % à 20 % en 2006 et tablent sur une progression sensible pour leur prochain recensement en 2011.

Les technologies de saisie des questionnaires papier sont aussi en progrès constant, notamment en ce qui concerne les techniques de lecture optique. Les solutions de reconnaissance optique de caractères sont désormais accessibles à tous les pays pour un coût raisonnable et de nombreux pays les utilisent ou envisagent d’y recourir pour leur prochain recensement.

Enfin, la diffusion des données via l’internet se développe considérablement et le cycle actuel de recensements voit la prolifération d’applications interactives de diffusion, le plus souvent associées à des représentations cartographiques.

Au-delà des innovations technologiques, qui visent à moderniser le processus de recensement tout en conservant le principe traditionnel des recensements, de nombreuses innovations tendent à réformer la méthode elle-même. À l’heure actuelle, deux grandes familles d’innovations méthodologiques se détachent. La première consiste à recourir à l’utilisation de registres de population, à l’image des pays d’Europe du Nord. Dans ces pays, un système complexe de registres (de population, d’entreprises, de logements…) est utilisé en combinaison avec des enquêtes appariées au niveau individuel afin de produire des résultats équivalents à ceux d’un recensement. D’autres pays, comme la Belgique, la Lettonie, la Slovénie, l’Espagne et la Suisse, utilisent le registre combiné à un recensement exhaustif, dans le but également d’améliorer la qualité des registres. La Turquie prépare son recensement de 2010 sur ce modèle. Enfin, l’Autriche, la Belgique, l’Allemagne, la Suisse et Israël planifient un recensement à partir de registre de population combiné à des enquêtes par sondage.

La seconde voie de réforme est celle suivie par la France et dans une certaine mesure par les États-Unis. Basée sur les idées de Leslie Kish, elle consiste à réaliser des enquêtes successives dans le temps (cf. article d’Olivier Lefebvre). On parle de recensement tournant, ou « rolling census ». La France fait figure de pionnière dans le monde pour avoir totalement rénové son recensement de cette manière depuis 2004. Les États-Unis ont remplacé en 2005 le questionnaire long du recensement décennal par une enquête tournante dénommée American Community Survey (ACS), mais ont conservé le recensement décennal avec un questionnaire court. Les premiers résultats de l’ACS combinant trois années d’enquête ont été produits en 2008. De nombreux pays s’intéressent de près à la méthode, notamment ceux ne disposant pas de registre de population et n’envisageant pas d’en disposer. À titre d’exemple, le Brésil, la Corée du Sud ou Oman réfléchissent à la mise en œuvre d’une telle méthode après leur recensement de 2010. Parmi les difficultés rencontrées, l’absence de sources administratives, en particulier pour le calage des données sur une année de référence, nécessite de travailler encore plus le plan de sondage.

Il est clair qu’une telle méthode présente un intérêt considérable pour les pays en développement, car elle permettrait de répartir la charge et de construire une infrastructure statistique de recensement durable, ce que ne permet pas le recensement décennal. Encore faudrait-il bien sûr que ces pays disposent de ressources annuelles stables à consacrer à la mise en œuvre d’un recensement tournant. Il y a toutefois encore de nombreux développements méthodologiques à réaliser avant de pouvoir envisager un recensement tournant applicable dans les pays en développement, mais l’avancée rapide des technologies de cartographie est à mon sens un des éléments clés de la construction de base de sondage adaptées à cette méthode.

Autrice

Olivier Lefebvre (1995)
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