Bruno Delecour (Ensae 78)
Directeur général de Canal +
Président-directeur général de Canal Satellite
Pouvez-vous nous retracer votre parcours ?
À l'issue d'une formation durant l'été qui a suivi ma sortie de l'Ensae je me suis essentiellement consacré durant deux ans à la pratique théâtrale. Ayant eu l'opportunité d'être engagé par la compagnie « Le retour de Gulliver», j'ai pu être distribué notamment dans « Ecce Uomo », pièce qui a été présentée au Festival d'Avignon, et dans « Prends bien garde au Zeppelin », jouée tant en France que dans quelques pays européens (Finlande, Allemagne, Hollande, Italie).
Réalisant que cette profession a peu d'élus au regard du nombre de comédiens pour le peu de possibilités de distribution offertes, je suis revenu à des métiers plus traditionnels pour ma formation.
C'est ainsi que dans une première étape, j'ai été chargé d'études à mi-temps au sein de Proscop, une société qui m'a fait découvrir l'importance de la communication, le milieu des études de marché. J'ai intégré par la suite le Centre d'études et d'opinion, devenu plus tard Médiamétrie. Ce centre alimentait Radio-France et les différentes chaînes de télévision de l'époque en études d'audiences, d'image, de satisfaction.
Considérant que vous vous inscriviez dans un domaine d'étude relativement récent, quels outils utilisiez-vous?
L’audiométrie n'existant pas encore, nous utilisions un panel d'audience et de satisfaction postal. Comme ces chaînes n'étaient pas en situation concurrentielle puisqu'elles relevaient du secteur public et qu'elles avaient par ailleurs leurs propres services d'études et de recherche, notre pâle se bornait à fournir des données sur la consommation télévisuelle.
C'est un peu en réaction contre cet aspect non opérationnel de notre travail de collecte et de mise en forme de l'information, une démarche qui relevait plus d'une pratique universitaire, que j'ai rejoint en 1986 l'agence de publicité Lintas. En tant que responsable de la recherche média, j'étais chargé de la fabrication d'outils de prévision d'audience pour permettre aux différents annonceurs de mieux situer les opportunités de passage de leurs écrans publicitaires.
Vous affiniez alors votre démarche?
Oui, même si elle était quelque peu artisanale au départ. Nous étions au tout début des modèles de prévision d'audience de la télévision. Le recueil d'un certain nombre de données et l'affinement de nos outils de travail nous permettaient de plus en plus de pouvoir faire des prévisions de type classique en Fonction de la saisonnalité et des programmes proposés.
Collaboriez-vous avec une chaîne en particulier?
Notre savoir-faire en tant que programmateurs d'écrans publicitaires dans la mesure où il nous permettait de prévoir l'audience d'un spot pouvait être étendu à 1,imipact possible d'un programme. Ceci nous a amené à collaborer avec TF1 à lui proposer des analyses en matière de stratégie de grille de programme, des analyses d'audience.
Vous aviez donc un rôle de conseil ?
Oui. Mais c'est plutôt frustrant de ne pouvoir assumer les conséquences des conseils que l'on pouvait donner. C'est
Justement comment situez-vous l'importance du marketing dans la stratégie de programmation d'une chaîne ?
Nous pouvons effectivement en décrivant le plus fidèlement possible les réactions du public, en donnant l'image de ce qu'il ressent, aider à la prise de décision, il n'en demeure pas moins que les choix ressortent des politiques éditoriales de chaque chaîne.
La fonction du marketing n'est pas de brider la créativité mais au contraire de mettre tout en oeuvre pour la favoriser. Ainsi, Canal + a toujours investi pour connaître la réaction du public et avait en France le plus gros budget consacré aux études et recherches proportionnellement à son chiffre d'affaire.
Quelles innovations ont été mise en oeuvre à Canal+?
Le concept de télévision à péage est très spécifique. La première préoccupation au delà de l'écoute permanente des abonnés est la prise en compte de sa satisfaction. Les émissions sont conçues comme des produits avec un cycle de vie, un positionnement à l'instar de n'importe quel produit industriel.
Nous proposons donc une approche rigoureuse et objective de suivi de l'image.
Est-ce que l'extension du groupe n'a pas suscité l'élargissement de vos prérogatives ?
Après la réussite du concept en France, Canal+ a exporté, en association avec des partenaires nationaux, son savoir-faire à l'étranger. Ainsi, depuis 1989, des chaînes ont été créés en Belgique, en Espagne, en Allemagne, en Afrique francophone. J'ai donc été amené comme chaque élément du groupe qui contribue dans son domaine propre, a parrainer les départements marketing de nos partenaires étrangers.
Concrètement cela signifie définir un positionnement, une campagne de communication publicitaire, suivre la politique commerciale de la chaîne et une fois les équipes marketing formées, veiller à la coordination de leurs réflexions.
Que représente le secteur publicité dans votre groupe?
Comme nos ressources principales émanent des abonnements et que nous n'émettons en clair que peu de temps, la publicité ne représente que 5% du chiffre d'affaires d'autant que nous avons des obligations contractuelles à respecter et la volonté de satisfaire nos abonnés.
Vous êtes actuellement Directeur général en charge des activités commerciales. Comment ressentez-vous le développement de votre groupe?
Au-delà du développement proprement dit, puisqu'un certain nombre d'activités comme Canal Satellite ou d'autres chaînes ont prix le relais de la croissance, il y a la satisfaction de voir qu'une entreprise française peut être performante au niveau international dans un domaine aussi difficile que la communication, en sachant allier d'une façon efficiente rigueur et créativité. Il m'est agréable d'avoir contribué à cette osmose.
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