Enquête Premier Emploi: taux d'activité important et a accès rapide a l’emploi
Au cours du mois de janvier 1996, l’Ensae a mené son enquête annuelle premier emploi, (dite enquête légère), destinée à étudier la situation, à la sortie de l'école, des élèves non fonctionnaires issus des promotions 1993, 1994 et 1995 ainsi que les conditions de recherche de leur premier emploi.
Effectuée depuis quatre ans, cette enquête est menée simultanément par l'ensemble des grandes écoles d'ingénieurs et de commerce appartenant à a Conférence des Grandes Écoles. Cette enquête, dont la pertinence dépend dans une grande mesure de sa représentativité, est indispensable pour disposer d'une photographie objective sur la situation réelle des jeunes diplômés.
Sont exclus du champ de l'enquête, les administrateurs de l'irisée puisque leur salaire est déterminé par une grille indiciaire. Ont également été exclus de cette analyse, les anciens élèves non fonctionnaires étrangers et anciens élèves du CESD1, lesquels retournent la plupart du temps travailler dans leur pays d'origine ou continuent une année de formation complémentaire à l'issue de l'Ensae. Enfin, les anciens élèves CESS2Mastère qui n'ont pas suivi une scolarité complète à l'Ensae ne sont pas diplômés statisticienséconomistes, et' en conséquence ne rentrent pas dans le champ de l'enquête. Le taux de réponse des groupes non pris en compte a, de toute façon, été relativement faible.
A l'issue de l'Ensae, la situation d'un ancien élève a été considérée comme étant unique. Les seuls états possibles pouvant être les suivants: occuper un emploi et ne pas en chercher un autre, occuper un emploi et en chercher un autre, poursuivre des études, effectuer le service national ou être en recherche d'emploi.
Ont été contactés 83 anciens élèves statisticiens économistes français ayant achevé leur scolarité en 1995, ainsi que 67et 70 anciens élèves statisticiens économistes des promotions 1994 et 1993.
Le taux de réponse est convenable pour la promotion 1995 (60 réponses, soit 72,3 % de la population concernée), en baisse pour les promotions 199,4 et 1993, avec respectivement 30 réponses (soit 44,8 % de la promotion) et 29 réponses (soit,41,,4% de la promotion).
Le faible effectif de la population étudiée n'autorise pas une analyse très détaillée. il se dégage néanmoins un certain nombre de caractéristiques, dont on peut, raisonnablement, penser qu'elles sont suffisamment robustes.
A l'issue de l’Ensae, la majorité des anciens élèves souhaitent exercer immédiatement une activité professionnelle. Ainsi, 63% des personnes issues de la promotion 1995 occupent un emploi tandis que 20% effectuent leur service national et 12% poursuivent leurs études. Parmi les répondants de la promotion 199~4, seulement 53% de personnes exercent une activité professionnelle; 27% poursuivent leurs études et 13 % effectuent leur service national. Pour la promotion la plus ancienne dans le cadre de notre enquête, le taux d'activité s'élève sensiblement pour atteindre 79% tandis que seulement 17% des répondants poursuivent leurs études (3% des personnes effectuent leur service).
Une différence importante existe entre polytechniciens et non-polytechniciens. Ces derniers ont bien moins souvent une activité professionnelle que les polytechniciens: 30% des élèves de la promotion 1995 n'ayant pas effectué leur scolarité à l'École Polytechnique se retrouvent sous les drapeaux à la sortie de l'Ensae, à la différence des X qui, dégagés de leurs obligations militaires, rentrent directement sur le marché du travail. Ainsi, 90% des polytechniciens de la promotion 1995 exercent une activité professionnelle contre seulement 50% pour les autres.
Parmi les personnes n'ayant pas de réelle activité professionnelle, et bien qu'étant « socialement productives », il y a également celles qui poursuivent des études, le plus souvent longues, envisagent un doctorat, entament des travaux de recherche. Ce choix de reporter l'entrée dans la vie active relève d'un choix personnel et n'est que marginalement influencé par la situation économique puisqu'à la question de savoir si la situation du marché de l'emploi avait pu influer sur leur décision de poursuivre des études, ces derniers, dans leur immense majorité, ont répondu par la négative.
UN TAUX D’ACTIVITE IMPORTANT DIGNE D’UNE GRANDE ECOLE
Si l'on exclut les personnes qui poursuivent leurs études ou qui effectuent leur service national, le taux d'activité net, défini comme le nombre de personnes ayant un travail sur le nombre de personnes ne poursuivant pas d'études ou n'effectuant pas le service national, s'élève à 93 % au bout de six mois (ces données concernent la promotion sortie fin juin 1995 et interrogée courant janvier 1996). Pour la promotion 1994 ce taux atteint 94%, pour la promotion 1993, il s'établit à 100%. Ces résultats, bien qu'obtenus à partir d'un échantillon de taille restreint, illustrent bien le taux d'activité élevé à l'issue de l'Ensae. Toutes promotions confondues (1993 à 1995), il n'y a que 3,4% des anciens élèves à rechercher un emploi, et encore ce chiffre est-il surévalué puisque sur ces personnes (au nombre de,4 ... ) une personne au moins a, entre temps, trouvé un emploi; les trois autres étaient en recherche active d'emploi depuis moins de 6 mois.
Le moyen de recherche le plus fréquent qui permet de décrocher le premier emploi à la sortie de l'Ensae reste la candidature spontanée (3,4% pour la promotion 1995 et 29 %,en moyenne, pour les trois dernières promotions), suivie par le stage de fin de deuxième année (21 % pour la promotion 1995 et en moyenne pour les trois dernières promotions). Le choix d'un stage, son contenu et sa mise en œuvre peuvent être déterminant pour l'obtention d'un premier emploi. En troisième position vient le service emploi-carrière de l'école (16% en moyenne pour les trois dernières promotions), devancé, pour la promotion 1995 sortante, par la mobilisation de relations personnelles (13%).
Pour leur premier emploi, les jeunes salariés en provenance de l'Ensae ont, dans trois cas sur quatre, un contrat à durée indéterminé (CDI). Aucune différence n'apparaît en la matière entre hommes et femmes, puisque, pour les trois dernières promotions, le pourcentage moyen de contrat à durée l’indéterminée est très voisin: 75% hommes et 72 %pour les femmes. Dans les deux populations, on constate toutefois une progression de la proportion de personnes ayant un contrat à durée déterminée (CDD): 24%, soit autant que pour la promotion 1993 (22%), mais nettement plus que pour les diplômés de la promotion 1994 (6%). Le ralentissement de l'activité économique constatée au cours du second semestre 1995 n'est certainement pas étranger à cette évolution.
DES CADRES HEUREUX
Quoiqu'il en soit, cela ne. nuit pas au statut d'embauche des élèves des trois dernières promotions puisque ces derniers occupent tous un emploi de cadre, ce qui n'est pas le cas de toutes les écoles d'ingénieurs et de commerce appartenant à la Conférence des Grands Écoles.
Toutes promotions confondues, le premier emploi représente, ou représentait, pour ces jeunes salariés un véritable emploi qu'ils comptent, ou comptaient, conserver, dans 83% des cas. Ce jugement positif est surtout le fait des promotions 1995 (87%) et 1994 (88%). En revanche, les élèves de la promotion 1993 sont plus nombreux à souhaiter changer de fonction. Leur ancienneté s'accompagne naturellement d'un souhait à accéder à des responsabilités accrues. Ainsi, trois personnes sur quatre seulement considèrent leur premier emploi comme un véritable emploi, le quart restant porte un jugement plus nuancé: le premier emploi n'est (ou n'a été) qu'un emploi intermédiaire mais qui leur sert (ou a servi) de marchepied pour leur carrière.
La mobilité est par ailleurs très importante. Au bout de trente mois (promotion 1993), plus d'un tiers des salariés en est à son deuxième emploi; au bout de 18 mois (promotion 1994) 6% occupent leur deuxième poste et au bout de seulement six mois 11 % des diplômés de la promotion 1995 ont déjà changé d'emploi. Cette rotation, relativement rapide, laisse à penser qu'il n'y a pas de réelle rigidité sur le marché du travail, du moins pour les salariés ayant une formation poussée en économie, statistique ou en finance, tels que les diplômés de l'Ensae.
LES INSTITUTIONS FINANCIERES ET BANCAIRES PARISIENNES SONT AU RENDEZ-VOUS
Les principaux employeurs se trouvent être les grandes entreprises: près de quatre élèves sur cinq issus des trois dernières promotions exercent une activité professionnelle dans une entreprise de plus de 500 personnes. Dans deux cas sur trois, il s'agit d'entreprises du secteur privée. Un tiers des élèves se tourne vers le secteur non concurrentiel: entreprises publiques ou parapubliques. Les employeurs sont avant tout des organismes d'assurance et des institutions bancaires. Pour les trois dernières promotions le classement, par ordre décroissant, est le suivant: UAP, J.P. Morgan, Société Générale, Paribas, BNP, Compagnie Bancaire, Caisse des Dépôts et de Consignation, Gan...
La zone de travail préférentielle est, et de loin, Paris ou la région parisienne. 90 % des jeunes salariés y exercent leur activité professionnelle, d'autant que la plupart des grands groupes ou sièges des grandes entreprises sont établis en région IledeFrance. Toutefois, un nombre non négligeable de personnes n'hésite pas à partir travailler à l'étranger: 9% des élèves des promotions 1993 à 1995 se ainsi sont expatriés vers des pays de la Communauté Européenne.
Tous secteurs confondus, le salaire annuel brut pour le premier emploi s'établit pour les élèves de la promotion 1995 exerçant une activité professionnelle (et ayant répondu à l'enquête), à 214600 francs en moyenne, en très légère hausse (+1,4%) par rapport au salaire annuel brut moyen des salariés de la promotion 1994 (211700 francs). Il est vrai aussi, qu'au vu des données disponibles, les salaires d'embauche avaient progressé de 11,8 % entre 1993 et 1994, le salaire annuel brut atteignant 189300 francs, en moyenne, pour les salariés de la promotion 1993. Précisons toutefois que ces évolutions dépendent sensiblement de la structure de nos échantillons de répondants par promotion: le sexe ou le « surdiplôme » seront des effets dont il faudra analyser l'incidence.
La mesure des salaires moyens peut néanmoins être entaché de marges d'incertitudes importantes, dues au faible effectif dë l'échantillon et à l'existence d'éventuels points extrêmes. L'emploi du salaire médian, indicateur plus robuste que le salaire moyen, parait alors mieux adapté. Les deux statistiques conduisent toutefois aux mêmes conclusions, aussi bien en niveau qu'en évolution: le salaire médian du premier emploi s'établit en effet à 212 500 francs pour les salariés de la promotion 1995 (+1,2% en un an), 210000 francs pour ceux de la promotion 1994 (+10,5% par rapport à l'année précédente) et 190000 francs pour les personnes de la promotion 1993.
LA RECONNAISSANCE DU PASSAGE PAR L’ÉCOLE POLYTECHNIQUE
La différence de salaire est importante entre les anciens élèves de l'École Polytechnique et les ' autres diplômés de l'Ensae. Le salaire brut d'embauche des X est en effet nettement plus élevé que celui des titulaires du seul diplôme Ensae. Pour la promotion 1995, le salaire moyen se monte à 236000 francs pour les premiers contre 195 000 francs pour les seconds. Cet écart absolu est constant pour les trois dernières promotions sortantes. Ainsi, pour la promotion 1994 le salaire moyen des polytechniciens s'élève à 240000 francs contre 198000 francs pour les nonpolytechniciens; pour la promotion 1993, on obtient, en moyenne, respectivement 225000 francs et 186000 francs brut comme salaire annuel brut d'embauche lors du premier emploi. Cette différenciation est à peine moins marquée lorsqu'on compare, non pas les salaires moyens, mais les salaires médians. Ain"si, pour les anciens élèves de Polytechnique le salaire médian d'embauche du premier emploi s'élève à 230000 francs en 1995, 240000 francs en 1 99~4 et 225 000 francs en 1993, pour les nonpolytechniciens le salaire médian se situe, selon les promotions, entre 190000 francs et 200000 francs. Cette dernière présentation est doublement intéressante puisqu'elle souligne, d'une part, l'écart de rémunération entre polytechnicien et nonpolytechnicien, et d'autre part, la relative stabilité de leur salaire d'embauche au cours de ces dernières années.
Cette différence de rémunération, qui effectivement peut paraître manifeste, s'explique, notamment, parles deux raisons suivantes: tout d'abord, les polytechniciens exercent, bien souvent, une activité professionnelle à mitemps au cours de leur troisième année de scolarité, cette expérience professionnelle étant par la suite reconnue sur le marché du travail et rétribuée à juste titre par les entreprises. La seconde explication tient au secteur d'embauche des polytechniciens, qui, plus que les autres, se tournent vers les secteurs de la finance et de l'assurance.
Une seconde distinction peut être opérée en fonction du sexe des répondants. De façon générale, les hommes ont un salaire d'embauche supérieur à celui des femmes. Pour la promotion 1995, le salaire annuel brut d'embauche s'élève à 223 700 francs en moyenne pour les hommes contre 200700 francs pour les femmes. Cet écart absolu diminue légèrement pour la promotion 1994 : 220000 francs pour les hommes et 199200 francs pour les femmes et devient quasiment inexistant ' pour notre échantillon de répondants issus de la promotion 1993: 190000 francs en moyenne pour les hommes et 188000 francs pour les femmes. Ceci est corroboré par l'analyse du salaire médian: pour les hommes, le salaire médian s'établit à 230000 francs en 1995, 215000 francs en 1994 et 190000 francs en 1993; pour les femmes, il est inchangé à 200000 francs de 1993 à 1995. Le salaire médian en francs courant n'a donc pas progressé pour les femmes en trois ans alors que pour les hommes il a cru de plus de 20%. Outre un effet de structure lié à la répartition des répondants entre polytechniciens et nonpolytechniciens, la hausse de près de 12% du salaire médian, tous sexe confondus, entre 1993 et 1995 trouve son origine dans l'appréciation sensible des salaires masculins depuis trois ans.
Ce constat peut, à première vue, s'interpréter comme une remise en cause du principe d'égalité des sexes. Toutefois, à poste égal, qualification égale, les salaires sont très proches entre hommes et femmes. La moindre rémunération globale des femmes résulte du fait que les femmes s'orientent moins souvent vers certains postes de finance particulièrement bien rémunérés, tels que « trader » et « market-maker » et privilégient plutôt les postes de chargé d'études, où les salaires sont moins élevés. Cette attitude rationnelle conduit immanquablement à un salaire moyen, ou médian, inférieur pour les femmes. Cet écart de salaire n'est donc pas tant la conséquence d'une ségrégation envers les femmes mais plutôt la conséquence de choix personnels.
UN ACCES RAPIDE A L’EMPLOI
Taux d'activité important et accès rapide à l'emploi: les grandes tendances montrent, sans ambiguïté, que les diplômés de l'Ensae restent des privilégiés. Ainsi, 84% des salariés de la promotion 1995 ont trouvé leur emploi en moins de deux mois, 11 % ont mis entre deux et quatre mois et 5% entre quatre et six mois. Les élèves sortants ont décroché leur premier emploi encore plus rapidement que ceux des promotions 1994 et 1993 .
En trois ans, la part de ceux qui trouvent un travail quasi immédiatement (en moins de deux mois) a augmenté (passant de 65,2 % pour la promotion 1993 à 84,2% pour la promotion 1995, en passant par 68,8 %pour celle de 1994), tout comme a décrue, à l'autre bout, la proportion de ceux qui mettent plus de quatre mois à trouver un premier emploi (21,7% en 1993, 12,5% en 1994 et 5,3 % en 1995).
Philippe Scherrer
1 C.E.S.D. :Centre Européen de formation des Statisticiens économistes des pays envoie de Développement.
2 C.E.S.S. : Certificats d'Etudes Supérieures Spécialisés.
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