La Chine en 2008 et les Jeux Olympiques
Les JO furent une réussite, à la suite d'une longue liste de succès qui ont relevé un pays exsangue pour l'installer aux sommets de l'économie mondiale. Grande puissance, la Chine n'est certes pas une démocratie. Les jugements occidentaux demandent toutefois à être mesurés : le régime bénéficie d'un soutien populaire et surtout, les emballements médiatico-politiques ne favorisent en rien l'avancée des droits, qui demande patience et mesure.
Il ne faut pas surestimer l’importance des Jeux Olympiques de Pékin.
Comprenons-nous bien : je pense que la décision du Comité International Olympique de confier à la ville de Pékin, et donc à la Chine, l’organisation des Jeux d’été 2008 fut une excellente décision. Une décision politique au meilleur sens du terme : la Chine n’avait jamais organisé les Jeux Olympiques et il fallait rattraper cette anomalie. Le moment était opportun, ni trop tôt ni trop tard. Ce fut le moyen pour le CIO, qui est qu’on le veuille ou non l’un des organes multinationaux par lesquels « l’opinion publique mondiale » s’exprime, de rendre justice au pays le plus peuplé de la planète, mais aussi pays dont l’écriture, la culture et l’histoire sont les plus anciennes.
Ces Jeux Olympiques furent un immense succès. Les organisateurs chinois ont bien compris que deux choses comptent dans les J.O. : la rigueur de l’organisation des épreuves sportives - en ce compris tout ce qui touche à l’accueil des sportifs, la facilité de leurs transports, la pureté de l’air qu’ils respirent… et bien sûr leur sécurité - et la qualité des images prises et transmises. Les J.O sont d’abord le plus magnifique spectacle de télévision qui soit. Les images de la Chaîne Centrale de Télévision chinoise (la maintenant fameuse CCTV) furent éblouissantes : des ralentis à couper le souffle, des points de vue ébouriffants grâce à un nombre record de caméras installées, une réalisation parfaite, la qualité Haute Définition pour la totalité des images et, pour la première fois, des Jeux entièrement visibles sur Internet. Ces Jeux furent ainsi d’abord ce qu’ils devaient être : une parfaite réussite sportive et télévisuelle.
J'étais à Pékin pendant les Jeux, l’ambiance était extraordinairement calme. Les autorités ont sacrifié tout ce qui devait l’être aux impératifs principaux rappelés ci-dessus. Ainsi l’activité économique de Pékin a été volontairement ralentie : des usines fermées ; des visas d’entrée émis au compte goutte et donc beaucoup moins de touristes que d’habitude au mois d’août ; moins de voitures en circulation ; moins de Pékinois présents (comme dans la plupart des villes organisatrices, les habitants qui le peuvent préfèrent quitter leur ville lors de l’organisation de grandes manifestation sportives) ; des boites de nuit fermées pour des raisons de sécurité ; tous les magasins vendant des produits contrefaits - une des attractions de Pékin, il faut bien l’admettre - fermés. Finalement, les grands perdants de ces Jeux furent les commerçants de Pékin (et d’abord les hôtels et les restaurants, exceptés les très rares heureux élus qui ont accueilli journalistes ou accompagnateurs) et les propriétaires d’appartement qui, avant les Jeux s’étaient monté la tête en imaginant leur ville envahie de touristes à la recherche d’un toit ! Ils ont été allègrement sacrifiés à la réussite collective. Mais que l’on se rassure : Pékin pour la Chine n’est pas l’équivalent de Paris pour la France. Pékin représente à peine plus de 1% de la population chinoise totale, moins de 5% de son PIB, sacrifier quelques pourcents de l’activité de Pékin ne représente rien de significatif.
Une réussite sportive et télévisuelle
Le succès des sportifs chinois lui même a été considérable : pour la première fois la Chine est, de loin, en tête des nations et les Chinois en sont très fiers. Qui ne le serait ? Nous Français nous sommes bien sentis regonflés par la victoire des « Bleus » lors de la coupe du Monde de football en 1998. Seule absence dans cette fierté sportive chinoise : celle d'une figure emblématique. Liu Xiang n’a pas été au rendez vous, Yao Ming guère plus, et les 51 médailles d’or ont été gagnées par des sportifs, certes exceptionnels, mais peu charismatiques et peu – ou encore peu – médiatisés.
Surtout, il ne faut pas exagérer l’importance de ces Jeux parce qu’ils ne sont qu’une, parmi bien d’autres, réussite de la Chine contemporaine. C’est formidable d’avoir aussi bien réussi ces Jeux… mais ce ne sont que des jeux ! Et soyez sûrs qu’il n’y a pas un seul Chinois pour l’oublier.
Ce que furent ces Jeux furent n'est qu'une composante - visible, médiatisée, sympathique - de la montagne de succès que la Chine remporte depuis exactement 30 ans, c'est-à-dire depuis que la politique d’ouverture définie par Deng Xiaoping s’applique. La Chine a émergé en 1976 d’un des tunnels les plus longs et les plus noirs qu’un pays a eu à traverser au XXème siècle, elle en est sortie affamée, désorganisée, sans élites, acculturée… exsangue !
Trente ans plus tard, elle est devenue la troisième puissance économique du monde (la deuxième si l’on tient compte des parités de pouvoir d’achat) et la première industrie. Elle l’a fait sans sacrifier son agriculture qui reste un secteur important (15% de son Pib) assurant l’autosuffisance alimentaire du pays, globalement et pour chacune des principales céréales. Elle l’a fait sans déséquilibre, ni externes (les balances extérieures sont toutes en fort excédent, et la Chine est le premier détenteur d’avoirs monétaires internationaux), ni internes (point plus délicat à affirmer avec certitude, les sociétés détenues par l’Etat ayant des comptes douteux et pour beaucoup d’entre elles en fort déficit… mais les budgets publics sont équilibrés).
Sans déséquilibres sociaux excessifs non plus. Quoiqu’on lise parfois dans la presse « occidentale » - surtout française d’ailleurs…- la croissance ne profite pas seulement à la frange urbanisée de la population ( 500 millions de personnes tout de même !) car en réalité les habitants des zones rurales bénéficient de transferts de plus en plus nombreux de la part des villes, par le biais de la solidarité familiale ou de politiques publiques volontaristes (en ce compris récemment une acceptation du renchérissement du prix des produits agricoles). Il est certain que la situation des paysans reste très en retard par rapport à celle des habitants des grandes villes (dans le domaine de la santé et de la protection sociale notamment), mais la Chine ne connaît pas la dichotomie sociale, le grand écart entre classes moyennes et classes pauvres, que connaissent les grands pays « du Sud » comme l’Inde ou le Brésil.
Il faudrait mentionner aussi la puissance militaire de la Chine et son accession au statut de puissance spatiale dont l’objectif est clairement lié à la défense.
Ce sont tous ces succès et leur effet visible - l’aspect des villes, le niveau de vie de la classe moyenne, le parc immobilier possédé par cette classe moyenne, le parc automobile nombreux et neuf, l’équipement des maisons, etc…- qui rendent les Chinois fiers de ce que leur pays a accompli en trente années et qui renforcent la stabilité du pouvoir en place. Et tout cela continue : toutes les « dérivées » du pays restent positives.
Pas d’élections démocratiques, pas non plus de terreur
Evoquons aussi les sujets délicats : bien entendu tout cela n’a pas été accompli dans le cadre d’une démocratie. Et je pense que tout cela n’aurait pas pu être accompli dans le cadre d’une démocratie. La Chine est un pays puissamment organisé, dont les organes de direction sont capables de définir les objectifs collectifs les plus ambitieux et de les atteindre. Seul un pays dont le pouvoir central est incroyablement fort peut accomplir de telles prouesses collectives.
D’où le pouvoir central chinois tire-t-il cette force ? Pas d’élections démocratiques. Mais pas non plus de la terreur. Le régime maoïste fut un régime de terreur. Le régime chinois d’aujourd’hui ne l’est plus du tout. C’est un régime qui s’appuie sur un parti de 70 millions de membres. Et surtout c’est un régime qui tient compte de son opinion publique. C’est un régime aujourd’hui très largement soutenu par sa population, mais qui pourrait s’écrouler s’il cessait de l’être. C’est un régime qui dure et continuera de durer parce qu’il réussit ce qu’il entreprend dans le sens de l’intérêt collectif.
La doctrine Deng Xiaoping est souvent résumée par la citation la plus célèbre du très grand petit homme : « Qu’importe qu’un chat soit blanc ou noir, pourvu qu’il attrape les souris ». C’était bien entendu une façon de faire passer « en interne » l’idée que l’on pouvait – que l’on devait - prendre des libertés avec la doctrine marxiste léniniste, si cela allait dans le sens de l’intérêt collectif, d’où la privatisation de l’exploitation agricole, le développement du secteur privé industriel, le fameux système « socialiste de marché avec des composantes chinoises », et surtout l’ouverture sur le monde placée au rang de qualité cardinale.
Mais comme souvent (toujours) en Chine, la même pensée est réversible et peut être comprise ainsi : peu importe les libertés que l’on prend avec la démocratie, si cela va dans le sens de l’intérêt général. La doctrine Deng Xiaoping est la culture du résultat. Et elle connaît depuis trente ans, du fait des extraordinaires qualités du peuple chinois, un succès époustouflant.
Une évolution inévitable
Est-ce à dire que la Chine conservera encore longtemps – le temps d’une dynastie, de deux ou trois siècles ? – son régime actuel et ne sera jamais une démocratie ? Non, bien au contraire. Lorsque l’on pose cette question à des chinois, intellectuels ou hommes de pouvoir, on obtient bien sûr des réponses et des opinions variées. Mais tous, même des membres du Parti Communiste Chinois, voient l’approfondissement de la démocratie comme un objectif souhaitable du pays.
Note édit: à mettre en exergue, format illustration « tous, même des membres du Parti Communiste Chinois, voient l’approfondissement de la démocratie comme un objectif souhaitable du pays »
Et plus encore comme une évolution inévitable : l’aspiration à la démocratie et aux libertés individuelles est la seconde face, le revers, de la politique d’ouverture mise en place par Deng Xiaoping. S’ouvrir au Monde a apporté énormément à la Chine : le know-how dont elle avait besoin pour passer de son état de 1976, digne de la fin de notre 18ème siècle, au 21ème siècle; les débouchés pour son industrie manufacturière ; les moyens financiers de son développement par le retour massif des fonds de la diaspora ; la possibilité de formation de ses meilleurs étudiants qui peuvent aller finir leurs études dans les universités américaines ou, en second rang, européennes, etc… Mais le revers de cette ouverture est que les Chinois voient ce qui se passe ailleurs, comment on vit ailleurs. Ils n’ont pas – même les plus jeunes – de vision idéalisée de la vie en Europe ou aux USA, mais ils en tirent quand même une aspiration personnelle profonde à plus de libertés (notamment la liberté d’opinion et d’expression) et un jour ils souhaiteront participer aux décisions collectives de leur pays, et donc voter. Internet joue bien entendu un rôle majeur dans cette évolution des mentalités : il a bien fallu installer Internet en Chine, car c’est aujourd’hui le vecteur principal de l’échange de connaissances et donc du progrès, mais c’est une fenêtre grande ouverte sur le Monde : le « Great Fire Wall » par lequel les autorités chinoises bloquent l’accès à certains sites – surtout de discussions – est une passoire !
Un des signes de l’avancée, sereine pour certains, un peu inquiétante pour d’autres, mais inévitable - vers la démocratie se trouve à Hong Kong. Pour cette Région d’Administration Spéciale, un calendrier vient d’être retenu : c’est en 2017, soit 20 ans après la rétrocession, que le dirigeant de l’exécutif Hong Kong sera élu démocratiquement, selon un engagement récemment pris par les autorités centrales de la République Populaire de Chine.
La Chine dans son ensemble va elle aussi avancer vers la démocratie. Mais à quel rythme ? Selon quelles modalités ?
Ici se pose une question à laquelle j’aimerais inviter les lecteurs à réfléchir : est-ce à nous « occidentaux » de donner des leçons ou même des conseils en la matière aux Chinois ? Avons-nous le droit de faire part de notre souhait de voir le processus aller plus vite, ou différemment ? Avons-nous la moindre légitimité pour le faire ?
Le passé ne plaide pas pour nous. Les puissances européennes (France et Angleterre en tête) se sont comportées en Chine comme des exploiteurs sans scrupules, des destructeurs brutaux ou des indifférents hautains lorsque la Chine était en proie à ses pires démons. Et dans la période la plus récente – depuis le début des trente glorieuses chinoises – je ne vois rien qui puisse être porté au crédit de nos pays. Nous avons commercé avec la Chine, dans le sens de nos intérêts réciproques (oui, je sais : la France y a moins que les autres pays européens trouvé son avantage, mais à qui la faute ?). Dans tout cela nous ne nous sommes créé aucun crédit !
De la légitimité des donneurs de leçons ?
Le fonctionnement de nos régimes politiques non plus ne plaide pas pour nous. Où en sont les droits de l’Homme en France ? Et quelles leçons peut-on tirer des brillantes interventions extérieures faites par les puissances occidentales au nom de la défense des droits de l’Homme (Somalie, Bosnie, etc…) ? Chacun peut se faire son opinion. Mais il est facile d’imaginer ce que le citoyen chinois correctement informé peut penser de la capacité, sans parler de la légitimité, des puissances occidentales à « apporter le Bien » dans le monde.
Que la Chine ait besoin de progresser dans le domaine des droits individuels et collectifs : c’est évident. Que des interventions extérieures puissent aider les Chinois à aller dans ce sens : je le crois. A titre personnel, en tant qu’éditeur, j’apporte une contribution en ce sens, en faisant connaître à l’étranger, donc en leur donnant une stature internationale, des auteurs courageux qui prennent des risques pour faire avancer leur pays dans le sens de plus grandes libertés.
Note édit: à mettre en exergue, format illustration «Une belle occasion perdue donc. Mais d’autres se présenteront ; La Chine a fait du mouvement son principe de fonctionnement. »
Mais nous, « occidentaux », devrions nous fixer une règle d’airain : ne jamais agir qu’avec la plus grande prudence, qu’avec un profond respect de la diversité des cultures, et en extirpant, si possible, l’arrogance si fortement ancrée dans nos têtes.
Nos « droits-de-l’hommistes » pavent leur chemin de bonnes intentions… et ils provoquent des catastrophes (ils le font parfois exprès, parce qu’ils ont bien d’autres objectifs que ceux qu’ils affichent et la défense des droits de l’Homme est souvent l’oripeau sous lequel se dissimule le dernier avatar de l’esprit colonial).
A titre d’illustration, voici ce que je pense des positions françaises à propos du Da Lai Lama.
Tibet et droits de l'Homme : une déplorable concurrence d'agendas
La question du Tibet n’est pas une question de respect des droits de l’homme. Pour être plus précis : la Chine n’est pas une démocratie et elle respecte mal certains droits mais rien n’est en la matière spécifique au Tibet. Les manifestations n’y sont pas réprimées plus durement qu’elles le sont dans le Xinjiang ou le Cantonnais pour prendre des exemples récents. Il faut faire avancer la Chine dans son ensemble, pas seulement au Tibet.
Ce qui est spécifique au Tibet est d’un autre ordre : des responsables religieux veulent y reprendre le pouvoir politique, dans un cadre d’indépendance (le Da Lai Lama dit parfois qu’il ne souhaite pas l’indépendance du Tibet… mais son équipe, le « gouvernement en exil » à Dharamsala, proclame le contraire).
Pour tous les Chinois, une telle indépendance n’est même pas imaginable. Aussi lorsque que nos « responsables » politiques ont pris des positions de « défense » du Da Lai Lama, alors en pleine crise politique avec le pouvoir central chinois, crise qu’il avait lui même sciemment provoquée à l’occasion des Jeux Olympiques, ces « responsables » ont fait ce qui pouvait indirectement le plus aider le pouvoir chinois. Ils ont en effet provoqué un sursaut nationaliste unanime chez les Chinois et fait passer au second plan les questions de défense des droits de l’homme.
Demander à la Chine de discuter de questions politiques avec le Da Lai Lama est contraire à tellement de principes fondamentaux – ceux de laïcité, de liberté de conscience, de choix des peuples à disposer d’eux-mêmes, etc. sans compter celui de l’intégrité territoriale des pays – en un mot est tellement inepte que le pouvoir central chinois n’a même pas eu besoin de faire campagne pour bénéficier du soutien unanime de sa population (et pas seulement des Hans, mais de toutes ses autres minorités aussi).
On dit parfois que les Jeux Olympiques ont soudé la Chine autour de ses dirigeants et fait oublié qu’ils n’ont pas de légitimité démocratique : ce n’est pas exact ; j’ai essayé de dire plus avant dans ce texte d’où vient le soutien très large dont bénéficie aujourd’hui le pouvoir chinois dans sa population.
Mais les actions de nos brillants « responsables » politiques en faveur du Da Lai Lama ont, elles, parfaitement contribué à ce soutien. Et au surplus elles ont décrédibilisé nos voix.
Une occasion manquée
Sans l’affaire de Da Lai Lama, les Jeux Olympiques auraient pu être l’occasion de faire - un peu - progresser les droits et les libertés du peuple chinois. Beaucoup ici à Pékin le souhaitaient. J’en fais partie. Nous aurions pu nous battre pour faire libérer des journalistes ou internautes emprisonnés ; pour porter le fer où il est légitime de le porter. Mais l’affaire du Da Lai Lama a tout gâché. Cet homme, très intelligent et très médiatique, qui sait même être amusant, a « préempté » les Jeux en sa faveur. Et nos politiques, qui, eux-mêmes, se résument de plus en plus à leur dimension médiatique, sont tombés dans le panneau, sciemment, pour plaire à une opinion publique mal informée.
Une belle occasion perdue donc. Mais d’autres se présenteront ; rien n’est jamais figé en Chine. Ce pays a fait du mouvement son principe de fonctionnement.
Après ces Jeux Olympiques merveilleusement réussis et cette année 2008 pleine de paradoxes pour la Chine - n’oublions pas les terribles tempêtes du début de l'année et le tremblement de terre du Sichuan, catastrophes naturelles auxquelles le pouvoir central chinois a su faire face comme très peu de pays « occidentaux » auraient su le faire, souvenons nous de Katrina -, ici, la vie continue. Avec entrain, confiance dans l’avenir, dynamisme et bonne humeur.
Le mouvement vers plus de démocratie est engagé. Seul un grave accroc de croissance ou un problème international majeur pourrait le stopper.
Le mieux pour les pays extérieurs est d’accompagner ce mouvement avec attention, amitié et respect. Et de ne surtout pas chercher à faire le Bien ! Peut-on espérer un peu de modestie et de clairvoyance de la part de nos « grands esprits » ?
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